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Afrodescendants d'Amérique Latine et des Caraibes
30 janvier 2013

La culture Yoruba des afrocubains et des afrobrésiliens au théâtre dans 'Feast'

 

Par Griselda Murray Brown
 Écri par cinq dramaturges et avec une intrigue qui s'étend sur quatre continents et sur 300 ans, 'Feast' est une production ambitieuse sur la culture yoruba
Rehearsals for ‘Feast’, with Yanet Fuentes in the centre
 

La plupart des auteurs travaillent seuls, et ne montrent leur travail aux rédacteurs en chef ou directeurs que lorsqu'ils sont en voie de terminaison. Trop de cuisiniers gâtent la sauce, dit le proverbe. Mais, parfois, le bouillon a besoin de plusieurs cuisiniers. Feast, qui s'ouvre au Young Vic de Londres ce mois-ci et est produit conjointement avec la Royal Court est une concoction de ce type. Écrit par cinq dramaturges d'autant de pays, son histoire - qui s'étend sur quatre continents et sur plus de 300 ans - est également racontée à travers la musique, la danse et la projection d'un film.

Un projet aussi ambitieux ne pourrait exister sans les points de vue multiples qui l'ont modelé. La pièce retrace le cheminement de trois sœurs, Oya, Oshun et Yemoja, séparées à un carrefour alors qu'elles se rendent à une fête. Mi-humaines, mi-divines, elles voyagent dans le le monde en incarnant différentes femmes noires à travers les âges.

La pièce débute au Nigéria en 1700, durant la traite transatlantique des esclaves; se déplace au Brésil en 1888, année de l'abolition de l'esclavage, puis en Amérique dans les années 1960, pour les sit-ins en faveur des droits civils, en 2008 à Cuba, où les croyances amenées par les esclaves de l'Afrique de l'Ouest vers le Nouveau Monde résistent avec force, et enfin de nos jours à Londres, où des adolescents noirs sont confrontés à des codes sociaux implicites. Après une rencontre à Londres pour discuter des idées principales du scénario et des thèmes, chaque auteur a rédigé l'ensemble de la section se déroulant dans son pays et ils ont ensuite été assemblés.

''C'est une façon très difficile de travailler'', reconnait le réalisateur de Feast, Rufus Norris, dont les récentes réalisations comprennent London Road et Vernon God Little. "Mais c'est aussi un sujet immensément difficile à traiter avec une quelconque authenticité si on prend juste une personne vivaant à un endroit. Certains des détails de la scène cubaine, n'auraient pu être conçcus que par un Cubain, et personne qui n'est pas de Londres n'aurait pu écrire ce que Gbolahan [Obisesan, le dramaturge britannique d'origine nigériane] a écrit ".


Feast explore la manière dont un système de croyances - spécifiquement celui du peuple Yoruba - migre et s'adapte. Le terme ''Yoruba'' décrit les personnes parlant une langue commune à l'intérieur du Golfe du Bénin (qui s'étend de l'actuel Ghana au Nigeria) depuis le 16ème siècle au moins. Aucune unité politique n'a jamais englobé toutes les personnes qui parlent le Yoruba, et ils n'ont pas existé en tant que groupe auto-conscient jusqu'à ce que la diaspora soit bien avancée.

Même si les Yoruba constituaient une minorité parmi les esclaves africains, l'influence culturelle de sa diaspora est énorme. Peut-être parce qu'il s'agissait de l'une des dernières tribus èa avoir été entrainé dans la traite négrière, au début du 19e siècle: sa culture ne s'est pas fondue dans celle des victimes ultérieures. Mais beaucoup, dont Norris, pensent qu'il ya des raisons plus profondes expliquant son influence.
''Ce que nous recherchons c'est pourquoi ce système de croyance là a équipé ce peuple là pour ce test particulièrement horrible'', dit-il. Norris soutient que la croyance yoruba aux orishas (divinités ayant différentes caractéristiques qui habitent les personnes) et dans la connaissance de son vrai ori (littéralement ''tête intérieure'') est essentiel. ''Si vous vous connaissez- vos faiblesses et vos forces - alors cela signifie que dans n'importe quelle situation, vous avez le choix: soit vous optez pour ce que l'orisha voudrait que vous fassiez, soit vous allez à l'encontre de cela. Et si vous avez le choix, alors, à un certain niveau, c'est le contraire de l'esclavage. "


Dans Feast, Oya, Oshun et Yemoja sont de différents personnages féminins chacun dans son contexte, mais elles sont liées par leurs orishas homonymes, qui dans une certaine mesure définissent leurs tempéraments.

Comme beaucoup de migrants, les esclaves à Cuba ont déployé de grands efforts pour conserver leurs croyances, même en déguisant leurs orishas en saints catholiques. La Santería, le système de croyances syncrétiques Yoruba-catholique qui en est découlé, est encore largement pratiqué à Cuba. Une scène dans Feast voit une prostituée cubaine couvrir sa statue de San Lázaro avec une feuille avant de se déshabiller, un geste qu'elle explique ainsi à son client américain, "Babalu Aye est très jaloux. Si une femme se déshabille devant lui, plus tard elle aura beaucoup de mal à avoir des hommes. C'est un Santocompliqué. "Pour elle, Lazaro et l'orisha Babalu Aye sont les mêmes.


Selon Rotimi Babatunde, l'auteur de Feast qui vit au Nigeria, ''ironiquement, la pratique des traditions Yoruba est plus forte à des endroits comme Cuba qu'au Nigeria". C'est l'intérêt du Nigeria pour la santería cubaine qui a donné l'impulsion à Feast . A la fin d'un atelier auteurs émergents rganisé par le département international de la Royal Court à Lagos en 2007, les tuteurs ont évoqué leur prochain atelier d'écriture à Cuba. Il y avait un grand enthousiasme parmi les Nigérians, curieux de savoir de quelle manière les traditions yoruba se manifestaient de l'autre côté de l'Atlantique. Quatre mois plus tard à La Havane, Cuba, la réaction était semblable: ''S'il vous plaît, apportez-nous un peu de terre du Nigeria", s'écriaient les écrivains. Lorsque la Royal Court a découvert que les dramaturges au Brésil étaient tout aussi enthousiastes - la religion Candomblé ayant les mêmes racines Yorubas - Feast a commencé à prendre forme.


''Votre maison c'est votre culture, ce n'est pas la terre sur laquelle vous vivez, c'est le système de croyance que vous portez avec vous'', me dit Norris. Mais l'idée que votre culture est inaltérée par votre emplacement présent peut être problématique. À quel moment une communauté diasporique devient un ghetto?

La pièce ne craint pas de telles questions. La scène se dréoule dans le Londres actuel - écrit par Obisesan, qui s'y est installé à lâge neuf ans en provenance du Nigeria - explore les tensions qui persistent même dans une ville qui se considère comme 'post-multiculturelle'. Oya, une jeune sportive noire, est harcelée dans la rue par Legua et par sa petite amie Oshun. Leurs provocations au sujet de la nature de la relation d'Oya avec son entraîneur blanc - la respecte-t-il vraiment ou est-elle ''juste son précieux poney ''? - questionne la propriété raciale et sexuelle. "Ta....appartient à un un homme noir," lui dit Legua.

Quand je questionne Obisesan sur la scène, il dit que certains hommes noirs ont une conscience élevée de "la façon dont ils sont représentés et comment certaines des choses qu'ils projettent dans la société pourraientt être interprétées. C'est ce truc chez eux qui consiste à essayer de s'auto-contrôler - mais aussi tous les autres''.

Ainsi Feast tend un miroir à la société contemporaine, celle de Londres particulièrement. Cependant, il n'épouse d'aucune manière le réalisme. "comme c'est une pièce sur la culture [yoruba], elle doit refléter cette culture avec toute sa théâtralité," explique Norris. "Par conséquent, elle doit être réalisée à travers le mouvement et la musique tout autant que par le texte, sinon tout ce que nous faisons n'est qu'une autre forme de colonialisme."

Avec le chorégraphe cubain George Céspedes, le batteur de Jamiroquai , Sola Akingbola, et avec une foule de danseurs à bord,la production est un mélange courageux du traditionnel et du contemporain. Même s'il est impossible de prédire si cela va fonctionner au théâtre, une telle approche collaborative semble appropriée pour un système de croyance aussi adaptable que celui des Yoruba. Dans Feast, la culture est quelque chose de perméable et qui évlolue constamment.

Comme Esu, l'orisha qui a le don de la transformation, affirme dans le prologue: ''La culture ne peut pas rester immobile, elle est dans un état de développement constant. Comme une culture de yaourt. La culture. Elle grandit. "

 

 Traduit de l'Anglais par Guy Everard Mbarga http://guyzoducamer.afrikblog.com/

http://www.ft.com/intl/cms/s/2/6ea441ae-58e3-11e2-99e6-00144feab49a.html#axzz2JSJMvIOr

‘Feast’, Young Vic, Londres, du 25 Janvier au 23 Février, www.youngvic.org

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