Un premier recensement des afropéruviens ce 22 octobre
En 2009, le Président Alan García a demandé un pardon historique au nom de l'État pour les siècles d'abus, d'exclusion et de disrimination du Peuple Afrodesendant au Pérou. Au cours de cette même année, le Comité de l'ONU qui contrôle la discrimination raciale – connu sous le nom de CERD – manifestait sa préoccupation face à l'absence de données officielles sur les afropéruviens. Depuis lors, en 2016, le Pérou a ratifié de la Convention Interaméricaine contre le racisme, la Discrimination raciale et les formes connexes d’intolérance.
Qu'à cela ne tienne, les besoins socio-économiques et politiques des afrodescendants demeurent ignorés et les afropéruviens figurent rarement dans les agendas des partis politiques. L'État péruvien n'a pour sa part réalisé aucune action affirmative ni initié de politiques publiques pouvant contribuer à leur développement.
Ce dimanche 22 octobre 2017, pour la première fois, le Pérou organisera un recensement national au cours duquel les afropéruviens pourront être décomptés.
Raza e Igualdad interviewe Cecília Ramírez, la directrice du Centre de Développement de la Femme Noire Péruvienne ( Centro de Desarrollo de la Mujer Negra Peruana -CEDEMUNEP) et membre du Comité Technique Interinstitutionnel sur les Statistiques de l'Ethnicité qui a préparé le recensement, de la formulation des questions sur l'auto-identification ethnique à la diffusion des résultats.
Pourquoi le recemnsement de ce dimanche est-il important pour le Peuple Afrodescendant?
Il permettra de savoir combien nous sommes, où nous sommes et principalement, dans quelles conditions nous sommes. La dernière fois qu'un recensement au Pérou a inclus une question racial remonte à 1940. Depuis lors, 77 ans sont passées.
Il n y a eu aucune vaiable ethnique dans les recensements antérieurs?
Depuis 1961, la variable ethnique est présente dans les recensements à travers une question sur la langue maternelle parlée dans le foyer. Cette fois et pour la première fois dans l'histoire du Pérou, la question porte sur la façon dont je m'auto-identifie ethniquement. Dans ce sens, les afropéruviens, nous pouvons choisir entre 6 catégories: negro, zambo, moreno, mulato, afroperuano ou afrodescendiente.
Les populations indigènes ont-elles également été traditionnellement exclues des recensements?
Il y a eu trois recensements d'identification pour les indigènes, mais aucun pour les afropéruviens. Le nom officiel du recensement de ce dimanche est “Le douzième recensement de population, septième du logement et troisème des communautés indigènes”. Et nous nous disons qu'il s'agit du “Premier pour les afropéruviens”.
Combien d'afrodescendants peut-il y avaoi actuellement au Pérou?
Il n'existe aucune donnée officielle, mais certains parlent de 0.1%, d'autres vont jusqu'à 5% et d'autres même 9%.
Quelle est leur situation économique et sociale?
Nous les afropéruviens faisons face à des brèches très profondes d'inégalités principalement dans les domaines comme l'éducation, la santé, l'emploi. On peut trouver qu'il y a eu des avancées au cours des dernières années, mais les brèches persistent.
Depuis combien de temps le CEDEMUNEP plaide pour un recensement inclusif des afropéruviens?
Déjà en 2010, on parlait de cela et nous avions produit un rapport sur la situation des droits humains de la population afropéuvienne. Et on est revenu il y a un peu plus de 5 ans dans les cadre des cycles de recensement. Le travail a été réalisé avec le soutien de Global Rights et à présent de Raza e Igualdad. Également en association avec l'Institut National de la Statistique et de l'Informatique (INEI), le Ministère de la Culture, le Défenseur du Peuple, le Juré Électoral National, certains gouvernements locaux, et avec certaines organisations indigènes et afrodescendantes comme Chirapaq, entre autres.
Quels ont été les défis?
Il y a eu un manque de connaissance et de compréhension de la problématique de la population afropéruvienne. Sans cette compréhension est difficile qu'il y ait une volonté politique réelle. Cela a été un défi de comprendre l'importance d'inclure une question culturelle et raciale dans le recensement.
Est ce qu'il y a eu des progrès?
Au début, ça été assez compliqué et il y a toujours des choses non résolues. Mais il y a des pas qui ont été franchies. Mais il y aura d'autres défis et enjeux avec les résultats du recensement.
Votre travail a-t-il ainsi été d'éduquer les autorités?
D'éduquer et aussi de sensibiliser. Non seulement au niveau national mais aussi international. Nous avons mené un travail d'incidence au niveau local et national pour sensibiliser le peuple péruvien et le peuple afropéruvien particulièrement sur l'importance de disposer de la question d'auto-identification ethnique dans le recensement.
En quoi le soutien international vous a été utile?
Aucun état n'aime être embarrassé face à d'autres pays. Et dans ce sens, l'état péruvien ne pouvait pas rester en marge des avancées en Amérique Latine. Dans les cycles de recensement, le mouvement afodescendant a relever l'importance d'avoir une question ethnique dans les recensements nationaux. Depuis lors, nos alliés internationaux comme le CEPAL, l'UNFPA et ONU femmes ont émis des recommandations, en disant que c'est important, ce qui a contribué de manière significative. Nous avons également pu compter sur des alliés comme la Fondation Ford qui nous a soutenu et continue de nous soutenir. Ils ont joué un rôle prépondérant.
Quelles conséquences peut avoir le recensement de ce dimanche pour le pays?
Un plan national pour le peuple afropéruvien dénommé PLADEPA a été élaboré. C'est une initiative pour le développement du peuple afropéruvien qui s'est fait en consultant la société civile. Mais il est d'une importance vitale que soient garanties les ressources économiques pour son implémentation.
Que se passera-t-il dans six mois lorsque les résultats du recensement seront publiés?
Il n'y aura plus d'excuses, puisque que nous aurons à disposition des indicateurs qui démontrent la situation actuelle et réelle de vie du peuple afropéruvien. On disposea de preuves claires et réalles de la brèche d'inégalité que nous subissons, et donc c'est pour cette raison que cela doit se traduire par des actions affirmatives, politiques publiques et que nous soyons inclus dans tous les programmes et plans que l'État implémente pour réduire la pauvreté dans notre pays.
Qu'est ce qu'il est possible de faire dans ce sens?
L'état a une gande responsabilité de même que la société civile afropéruvienne. Nous devons travailler de manière conjointe pour générer des changements.
Et vos espoirs pour le futur?
J'espère que l'état péruvien pourra réellement répondre aux demandes des besoins du Peuple Afropéruvien, et qu'il se rappelle que la pauvreté à laquelle nous faisons face est liée au racisme et à la discrimination ethnique et raciale. Et qu'il existe une volonté politique réelle pogressivement combler cette brèche d'inégalité que nous subissons, que nous ayons une meilleure éducation, une santé de qualité, de meilleurs emplois, une plus grande paticipation et représentation politique. Et que l'état se souvienne que d'investir sur les afropéruviens revient à investir sur le développement du pays, et que historiquement, nous avons contribué à la construction de la nation péuvienne et que nous continuons de le faire.
Traduit de l'Espagnol Par Guy Everard Mbarga
http://raceandequality.org/articles/el-primer-censo-para-afroperuanos-entrevista-con-cedemunep/