Martha Juanita Nieto : "Ce qui m’indigne, c’est que différence raciale implique une différence de classe"
Le fait d’occuper un emploi dans l'entretien ménager n’est pas indigne. Ce qui est indigne c’est de penser que la couleur de la peau ou l’emploi d’une personne la rend plus ou moins humaine, même en 2011.
Les photos qui ont récemment été publiées par les médias (si vous voulez en savoir plus cliquez ici) montrent concrètement deux choses: 1. L’absence d'opportunités pour les minorités en Colombie, et 2. Le racisme dont nous n'avons pas voulu parler jusqu'à présent.
Nous pouvons continuer de prétendre que le racisme n’existe pas en Colombie, ou que nous avons tous des chances égales. Mais les photos comme celles récemment publiées dans la revue Hola nous montrent clairement la gravité du problème auquel nous faisons face.
Je vais vous raconter mon histoire. Lorsque j’ai terminé mes études aux États-Unis et que je suis revenue à Cali, ma ville natale, je me souviens de m’être rendue à une fête dans une grande boite de nuit de la ville. Mais cette fois, pour la première fois, je me suis rendue compte que j’étais la seule afrocolombienne qui ne servait pas les amuse-gueules. Ce qui semblait normal dans la société de Cali dans laquelle j’ai grandi a alors commencé à me gêner. Je venais de vivre dans un pays où le racisme peut être plus présent ou plus direct, mais où on a à coup sûr travaillé en tant que société pour promouvoir progressivement une plus grande égalité des conditions. Ce n’est pas le cas en Colombie, où, même si nous ne reconnaissons pas le racisme aussi clairement que les Étasuniens, les minorités sont les plus touchées par le manque d'opportunités.
Ce qui m’indigne moi ce n’est pas que les dames de couleur qui apparaissent sur les photos travaillent comme domestiques. Ce qui m’indigne moi, c’est le fait qu’il soit normal pour certains Colombiens que ce type de photos, sur lesquelles une différence raciale, implique automatiquement une différence de classe.
La situation me fait réfléchir et m’amène à ébaucher une première proposition. Il nous faut davantage d'éducation de part et d’autre: 1. Pour que les minorités aient de plus grandes opportunités, et 2. Pour les personnes ayant des positions sociales influentes aient une plus grande conscience sociale et prennent leurs responsabilités en encourageant une société plus inclusive. Même s’il est digne de travailler comme domestique, comme pour tout autre emploi, les photos de ce type perpétuent les stéréotypes et les différences d'opportunités qu’en plein 2011, on devrait déjà être en train de penser à éradiquer.
Martha Juanita Niet Merchandiser & Marketing Manager de la casa de modas italiana Valentino
Le problème n'est pas de savoir qui apparaissait sur la photo et qui n y apparaissait pas, le problème est que cette photo montre à quel point nous sommes loin de lutter contre un problème qui est réel et qui porte préjudice à la trame sociale colombienne. La meilleure façon de résoudre un problème c’est d’y faire face, non pas de faire comme s’il n'existe pas.
C’est la raison pour laquelle je vous invite à participer et à prendre part à la campagne Chao racismo! Cette campagne qui sera lancée aujourd'hui (le 17 décembre)à Cali, veut contribuer à ce que " les futures générations de colombiens et de colombiennes puissent vivre et se développer sans penser au fait que leurs destins sont liés à leurs couleurs de peau , leurs conditions sociales, leurs sexes ou leurs origines ethniques "
Traduit de l'Espagnol par Guy Everard Mbarga http://guyzoducamer.afrikblog.com