Une étude du Pnud révèle la misère que vivent les afrocolombiens
Une des conclusions de l'étude du PNUD Colombie sur la situation des afrodescendants est que la discrimination que subit cette population la rend plus vulnérable.
María Victoria Correa | Medellín |
Un peu plus de la moitié de la population afrodescendante se couche sans avoir pris l'un des trois repas quotidiens. C'est l'une des nombreuses révélations que fait l'étude Les Afrocolombiens face aux objectifs de développement du Millénaire présentée par le Programme des Nations Unies pour le Développement en Colombie (PNUD) dans le cadre de l'Année Internationale des Afrodescendants.
L'étude souligne la situation grave concernant l'analphabétisme à San Basilio de Palenque, le fait qu'il y ait dans le Chocó cinq fois plus de décès des nouvelles mères qu'à Bogota et aussi que l'informel constitue le modèle d'emploi ordinaire chez les afrodescendants.
Il indique également que le travail des femmes afrocolombiennes rentre dans le cadre de l’informel dans la préparation des aliments, le commerce de détail, l'artisanat et des services domestiques.
L'étude du PNUD fait cinq recommandations qui sont les suivantes:
Formuler et appliquer un plan national de lutte contre le racisme et la discrimination raciale.
Renforcer la capacité d'action politique de la population afrocolombienne à exiger des droits et concerter les options pour avancer dans le développement humain et vers la réalisation des Objectifs de Développement du Millénaire.
Concevoir et mettre en œuvre des plans et des programmes différentiels avec une approche territoriale dans les régions de concentrations urbaines des afrocolombiens.
Inclure la variable ethnique dans les registres d'information de l'État pour faciliter la prise de décision en faveur des Afrocolombiens.
Ci dessous la situation des afrocolombiens concernant les Objectifs de développement du Millénaire
Pauvreté Extrême
La première chose que le rapport révèle c'est une comparaison entre la pauvreté et la pauvreté extrême chez les personnes afrocolombiennes et celles qui ne le sont pas. Il indique que tandis que 60% des afrocolombiens se trouvaient dans la pauvreté et 24% dans l'indigence, les chiffres pour la population non-ethnique étaient de 54% et 18,6% respectivement. Le rapport indique que les différences de 5,9 et de 5,5 points de pourcentage révèlent les écarts dans l'accès aux opportunités et des conditions de bien-être entre les deux populations.
Le Choco est le département ayant les plus forts taux de pauvreté, où il atteint 70,5%, presque le double de la moyenne nationale. De plus, 41% des habitants du Choco vivent dans la pauvreté extrême, 2,5 fois davantage que dans l'ensemble du pays, dont le taux est de 16,4%. Face à la question de l'accès à la nourriture, le panorama général est prometteur selon l'étude. Cependant, des données précises montrent que cet indicateur a empiré dans quatre départements, parmi lesquels le Chocó, département afro par excellence, où la prévalence de la malnutrition infantile est de 2,6 points au-dessus de la moyenne nationale de 28. Le rapport souligne également que les niveaux élevés de malnutrition à La Guajira et Sucre, restent parmi les plus hauts du pays. En plus, selon l'étude, un peu plus de la moitié de la population afrodescendante de Colombie termine la journée dans avoir pris une des trois repas nécessaires.
Éducation de base
L'étude révèle que dans les départements ayant une population afrodescendante, les taux d'analphabétisme peuvent être jusqu'à six fois plus élevés que la moyenne nationale, comme dans le cas de Nariño et jusqu'à trois fois comme pour Chocó, Sucre ou César.
L'étude indique de plus que pour la Colombie, le défi se trouve au niveau de l'éducation préscolaire et moyenne. Au préscolaire, les 45 municipalités ayant une population afrodescendante ont un taux moyen de couverture de 76% tandis que la moyenne nationale est de 86%. Cependant, l'étude souligne que en ce qui a trait à la couverture de l'éducation de base, la Colombie a atteint les objectifs de Développement du Millénaire (OMD) avec des indicateurs de près de 100% de couverture universelle bénéficiant sans distinction aux enfants afrodescendants et aux enfants non-ethnique.
L'étude note que l'un des cas les plus préoccupants est celui de San Basilio de Palenque, puisque si on compare son taux d'analphabétisme avec les taux des territoires auxquels il appartenait en 2005, les différences sont significatives, le Palenque ayant ceux les plus élevés. L'analphabétisme à San Basilio est de 8,6%t, alors qu'en Colombie, il est de 2,01 %. Autres cas relevés dans le rapport, celui de Cartagena où 32% d’adultes afrodescendants sont analphabètes et à Buenaventura où 10% de la population n'a pas terminé un cycle complet d'éducation. De plus, 25 des 100 municipalités ayant les plus faibles taux de couverture préscolaire sont afrocolombiennes.
Durabilité de l'environnement
Les indicateurs associés aux Objectifs de Développement du Millénaire (OMD) comprennent la reforestation, la couverture de l'approvisionnement en eau, en égouts et l'assainissement de base ainsi que la qualité des de l’habitat. Parmi les données importantes, l'étude révèle que 83 % des cinq millions d'hectares de territoires collectifs des afrocolombiens sont couverts de forêts. Cependant, l'exploitation minière, les conflits armés et les déplacements ont eu un impact incalculable sur ces territoires et sur leurs populations, fragilisant les niches écologiques, l'économie des afrodescendants et leurs structures socioculturelles et productives. La couverture en eau potable, en égouts et d'assainissement rural de base font partie des cibles visées et les domaines dans lesquels la population afrocolombienne a le plus grand retard.
Les couvertures en eau potable sont plus faibles dans les régions Caraïbes et Pacifique. À Cartagena, seulement 63,6 % des foyers afrocolombiens sont reliés aux égouts. Dans les départements du Nariño et du Cauca (Pacifique) on retrouve l’un des plus importants déficits qualitatifs de l’habitat du pays pour près de 70% des cas. Les chiffres rapportés pour cet ODM permettent de reconnaître l'énorme retard qui existe dans la couverture d'eau et de service d'assainissement de base entre les territoires peuplés d’afrodescendants et ceux ne l’étant pas, une brèche qui se répète dans chacun des cas. Il en est de même en ce qui concerne les énormes écarts, spécialement dans la qualité des logements de la population afrocolombienne.
L'équité et la mortalité infantile
La plus forte proportion de femmes ayant déclaré avoir été agressées physiquement par leur époux ou partenaire, selon le rapport, se trouve dans la région Pacifique (41,1%), et la plus faible proportion dans la région Caraïbe (29,5 %), avec comme base la moyenne nationale de 37,4%.
L'étude indique que ces résultats ne peuvent pas inférer un lien entre l'ethnicité et la violence, étant donné que les données extrêmes correspondent aux deux régions comptant le plus d’afrodescendants.
Selon le rapport, le cas de la région Pacifique est plutôt attribuable à la situation de violence qui touche actuellement cette zone qui a généré des changements dans les rôles des femmes. Il précise également qu'il est urgent qu’il y ait davantage d’informations statistiques permettant de connaître la dimension de cette réalité afin de pouvoir définir des politiques dans ce sens.
Le rapport note que les revenus perçus par les femmes afrodescendantes qui travaillent est inférieur à celui des femmes et des hommes qui n'appartiennent pas à ce groupe ethnique.
D'autre part, et face à l’objectif de réduction de la mortalité infantile, l’étude indique que la région Caraïbes est celle qui présente le plus de cas de mortalité chez les enfants de 1 et 5 ans, suivi par Bogotá et la région Pacifique. De même, l'espérance de vie à la naissance a augmenté, ce qui montre de manière indirecte des améliorations des conditions de santé des habitants, et aussi qu’ont diminué les taux de mortalité générale, maternelle et infantile.
Traduit de l'Espagnol par Guy Everard Mbarga http://guyzoducamer.afrikblog.com