Haiti : De l’instruction et du respect pour les « restavèk » à l’IHDC
servicios espacinsular La majorité d’entre des enfants fréquentant l’Institut de développement humain et communautaire sont des « restavèk », c’est-à-dire des enfants placés en domesticité dans des familles d’accueil. Les autres sont des enfants issus de famille très pauvres et/ou de rues. Mais tous un point commun, la précarité. Délaissés par leurs parents en proie aux pires difficultés économiques, ces enfants se voient obligés, dès leur plus jeune âge, de lutter seul pour survivre. Et pour y arriver, ils s’adonnent-ils à toute sortes d’activités. En effet, dans leur maison d’accueil, les restavèk sont le plus souvent responsables de la plupart des tâches ménagères et prennent soin des enfants de leur famille d’accueil. Les enfants des rues, quant à eux, se prêtent essentiellement au nettoyage des voitures ou e livrent à la mendicité. Les enfants de l’IHDC sont aussi de petits travailleurs, même quand ils sont dans leur propre famille. Et parmi eux figurent des petits coursiers, ou des « chercheurs de clients » pour les transports publics… un quotidien fait d’obligation, de servitude, de maltraitance au détriment de l’instruction voire de l’affection. A son retour au pays, après avoir vécu 30 ans aux Etats-Unis et travaillé dans le social, la communication et des droits civiques, Nicole César s’est sentie interpellée par la situation des enfants défavorisés, particulièrement ceux en domesticité. Pour elle, il était impérieux d’entreprendre une action en leur faveur. « Nous avons commencé par distribuer des vêtements et des chaussures aux enfants démunis de notre quartier, mais nous avons estimé que ce n’était pas suffisant », explique Mme César. Pour donner plus de poids à son action, elle a mis sur pied avec son mari et deux amis de la communauté de Boston, l’IHDC. Pendant deux ans, l’Institut a travaillé à Carrefour-feuilles, un quartier pauvre de la capitale haïtienne. Il a ensuite ouvert ses portes à Tabarre, une commune dans laquelle il vient en aide aux enfants défavorisés, depuis 8 ans. « Ce que vivent ces enfants est inhumain. Ici, nous les traitons comme s’ils étaient nos propres enfants ». Respect, compassion, amour sont, en effet, le credo de l’IHDC dont les 30 membres du personnel se dévouent pour la cause de ces petits. La nécessaire réhabilitation identitaire Apporter un peu d’humanité dans leur existence passe d’abord par l’attribution d’une identité à ces enfants. En effet, la plupart de ses enfants ne connaissent que leur prénom, ne disposant pas d’acte de naissance. Nombre d’entre eux retiennent uniquement des sobriquets, tels « Ti Jacques» / petit Jacques. Les familles d’accueil disent la plupart du temps ignorer le nom complet de l’enfant. Raison pour laquelle, dès leur arrivée à l’IHDC, de nombreuses démarches sont entreprises auprès de la famille d’accueil afin de pouvoir retrouver leur nom complet. Autre priorité dudit centre, l’éducation. Dans leur programme de formation figurent l’éducation religieuse, éducation civique, éducation artistique. Prenant en compte le fait que ces enfants n’aient jamais fréquenté d’institution scolaire, l’IHDC a mis sur pied, à leur profit, un programme académique spécial. Le but de ce programme est de leur permettre de pouvoir intégrer le système scolaire normal. Ces jeunes bénéficient également d’un repas chaud par jour et de services de santé, qui, parfois, proviennent de personnes de bonnes volontés. A titre d’exemple, une équipe de médecins américains originaires de la ville de Boston rentrés en Haïti avait offert, l’an dernier, des consultations médicales gratuites aux enfants de l’IHDC. Un défi au quotidien A chaque jour suffit sa peine à l’IHDC car les défis sont quotidiens. « Si nous sommes encore actifs c’est un véritable miracle », comme le souligne Mme César. L’an dernier, les difficultés étaient telles que la directrice craignait de devoir fermer l’institution. L’organisme humanitaire qui vit essentiellement des dons des amis des membres fondateurs, et des revenus de Mme César, par ailleurs directrice de Santé de l’ONG haïtienne FONKOZE, a du mal à joindre les deux bouts. Pour pouvoir poursuivre son action, la directrice « rêve de ce qu’il y a de mieux pour ses petits protégés et son personnel ». Mais le mieux coûte cher et les entrées ne sont pas toujours au rendez-vous, malgré les contributions de certaines institutions de la place, telles le Consortium National d’Education Civique (CNEC), la Fondation Panaméricaine pour le Développement (PADF), le Fonds d’Assistance Economique et Social (FAES). Retenir les enfants, obtenir quotidiennement l’adhésion de leurs parents adoptifs pour que les petits viennent à l’institut sont aussi un enjeu de grande taille. Ces enfants peuvent être occupés à diverses tâches dans leur domicile ou ailleurs. Avec le temps, le personnel de l’IHDC a développé des stratégies pour s’assurer de leur présence régulière. Ainsi, si dans un premier temps, l’institut ne recevait des enfants âgés de six ans et plus. Aujourd’hui, des touts petits sont aussi admis, il s’agit des petits que gardent les aînés. « Nous avions constaté que plusieurs enfants ne venaient pas parce qu’ils devaient garder les petits de leur famille d’accueil. Nous avons proposé qu’ils viennent aussi », explique Mme César. La venue des enfants des parents adoptifs est considérée par les responsables de l’institution comme une véritable victoire. La sensibilisation de la famille d’accueil fait partie également des actions de l’IHDC. Et elle prend plusieurs formes, notamment des visites à domiciles ou encore des séminaires de formation à leur intention. A croire les responsables, ces stratégies permettent au et à mesure aux parents adoptifs de poser un autre regard sur le restavèk, le considérer moins comme une source d’ennuis. L’action de Nicole César pour ces enfants n’est pas passée inaperçue. Ce 23 octobre elle a reçu le prix Héros de l’Hémisphère. Un prix décerné par la Fondation Panaméricaine pour le Développement (PADF) à un simple citoyen dont « le travail apporte un changement important dans la vie de sa communauté ». A quand la fin du phénomène restavèk? Si des petits pas sont faits vers l’amélioration des conditions de vie des enfants de l’IHDC -les responsables disent constater moins de violences corporelles- il n’en demeure pas moins que les enfants restent victime entre autres, de maltraitance psychologique, corporelle, stigmatisation et marginalisation. Et dans la majeure partie de leur production artistique se reflète la violence dont ils sont souvent l’objet, telle l’initiation sexuelle précoce. Cette triste réalité est aussi présente dans leurs jeux. Aussi, le personnel se voit-il obligé de confisquer révolver en plastique, lame de rasoir, limes à ongles dont ils se servent pour se menacer mutuellement, mais également des pots en plastique contenant de l’alcool. Le vécu inhumain, comme le qualifie Mme César, des enfants de l’IHDC est quasi identique à celui des 150.000 à 500.000 restavèk du pays. De nombreuses organisations locales et internationales tirent la sonnette d’alarme sur ce sujet, les Nations Unies, entre autres. Ainsi, le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies a organisé le 16 septembre dernier un dialogue interactif sur cette problématique avec la rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines d’esclavage, Gulnara Shahinian. Des recommandations sont faites par la Rapporteuse spéciale afin de combattre cette forme de maltraitance. Elles portent notamment sur la nécessité de « faciliter l’enregistrement des enfants à la naissance dans l’ensemble du pays », de « permettre aux familles pauvres des communautés rurales de développer une activité agricole », de « veiller à ce que l’enseignement primaire soit obligatoire et gratuit », « de procéder à une décentralisation pour trouver une solution aux problèmes économiques et sociaux ». Rédaction : Martine Denis Chandler Edition : Uwolowulakana Ikavi
PUERTO PRINCIPE, Haití, 29 de octubre de 2009.- Dans la commune de Tabarre, un faubourg de Port-au-Prince, une institution travaille depuis 10 ans en faveur des enfants défavorisés de la zone. Il s’agit de l’Institut de développement humain et communautaire (IHDC). Dirigée d’une main de fer par une femme au grand cœur, Nicole César, cette institution donne à ces enfants ce qui leur manque le plus : instruction et affection.