Les afronicaraguayens lèvent la voix (partieII)
(Publié le Lundi, 11 juin de 2007)
Par: Audra D.S. Burch.
Traduction : Guy Everard Mbarga
Dans les années 60, à mesure que le mouvement des droits civils se développait aux Etats-Unis, les noirs formèrent une coalition pour négocier de meilleures conditions de vie. Cet effort a disparu avec le début de la révolution sandiniste de 1979. Après la guerre, les sandinistes promirent de mettre fin à la discrimination raciale et de promouvoir les cultures nationales. En même temps, on les accusa justement du contraire, c’est-à-dire d’opprimer les groupes déjà marginalisés.
Il aura fallu près de trois décennies avant que les régimes sandinistes prennent des mesures significatives. Il y a à présent un optimisme prudent avec le retour de ce gouvernement. Bien que la côte atlantique est peuplée depuis le 17ème siècle, la première route qui relie la côte avec le reste du pays a été construite il y a seulement 50 ans. Elle est encore non praticable en saison de pluies et n’est pas encore terminée. Une grande partie du mouvement contemporain sur la côte provient d’individus morts il y a très longtemps: Martin Luther King Jr. et Bob Marley. Le message ferme d’égalité de King et les paroles sociales des chansons de Marley sont arrivés ici dans les années 70, portés par des jeunes qui travaillaient dans les bateaux de croisière et ramenaient des livres et de la musique. Le dirigeant non officiel de Pearl Lagoon, William Wesley, un individu chaleureux au sourire facile vit sur la rue principale, avec vue sur le village. Dans le salon de sa maison trône un portrait de King accroché près du téléphone. Avec ses huit enfants, Joseph a passé sa vie à monter et à descendre les collines de Bluefields et s’est établi comme l’une des matriarches du pueblo. ``Je n’ai pas honte. Je ne renie pas ma couleur, mais d’autres si''. Sur cette côte, il existe un amalgame d’indiens miskitos, de métisses et de noirs. Les ancêtres d’autres afronicaraguayens étaient des noirs affranchis qui émigrèrent de la Jamaïque et d’autres pays caribéens, attirés par les emplois fixes disponibles pour ceux qui parlaient anglais. Les histoires abondent de personnes s’étant cachés derrière une peu sombre et qui se sont fait passer pour des indiens miskitos, ou des métisses . http://www.iidh.ed.cr/comunidades/Diversidades/noticia_despliegue.aspx?Codigo=6492 http://elinformativo.grupo-intech.com/index.php?option=com_content&task=view&id=163&Itemid=31 http://www.elnuevoherald.com/167/story/51418.html http://www.miamiherald.com/multimedia/news/afrolatin/part1/index.html http://www.americas.org/item_32772
Le dernier tronçon de Managua à Bluefields se traverse en barque par le fleuve Escondido. Malgré son éloignement, la zone n’a jamais été complètement isolée du monde extérieur. Certains résidents ont le téléphone, écoutent la radio et regardent des émissions étrangères à la télé, et quelques uns ont même accès à internet.
''Les jeunes venaient et parlaient de ces gens'', dit Wesley, un maître à la retraite. ``J’en savais déjà des choses, mais je voulais savoir plus. Je me suis retrouvé dans les enseignements de King et de Malcolm X. J’ai découvert mon patrimoine africain. Nous devons apprendre de ce qu’ils disaient pour nous aider à créer une route que nous tous pouvions suivre''.
À Bluefields, Carmen Joseph, ou ''Miss Carmen'', qui selon de nombreuses personnes fait la meilleure salade de pomme de terre dans tout le village, sort de chez un voisin pour évoquer le sujet, car elle le considère trop délicat pour en parler à l’intérieur de la maison.
''Oui'', susurre-t-elle, sans regarder de face. ``Il y a des gens qui ne disent pas ce qu’ils sont. Je suis noire, et j’ai élevé ma famille de telle sorte qu’elle sache qu’elle est noire''.
Pour pouvoir apprécier l’histoire de la race dans cette région, il faut comprendre l’héritage kaléidoscopique de l’esclavage, la diabolisation et la négation de la négritude et la pratique du mélange racial.
Les choses se compliquent encore avec le manque des données de recensements fiables, du fait des habituels décomptes réduits, et car certains noirs ne s’identifient pas comme tels.
'C’est difficile de se mobiliser alors qu’on est encore en train de récupérer notre identité et qu’on commence à utiliser le terme `noir' '', dit Hooker, la professeur de Texas dont le père fut conseiller régional.
Il y a un an, Shirlene Green Newball, qui a grandi à Puerto Cabezas, a laissé sa permanente poussé jusqu’à ce qu’elle disparaisse. ''J’ai voulu démontrer et savoir qui je suis'', dit Newball, qui travaille pour une organisation féminine.
Newball a réfléchi un temps sur ce que signifiait être noir ici. Elle a considéré tous les termes: morena, coolie, afro, chocolate, negra. Elle a alors décidé que les cheveux naturels seraient l’expression la plus pure de la négritude.
''On voit un mouvement noir authentique sur la côte, mais les choses avancent lentement '', dit Kwame Dixon, un professeur assistant d’Études Afroaméricaines de Syracuse University.
À Pearl Lagoon, qui compte 3000 habitants, les chiens dorment sur le quai, la rue principale est plus un chemin poussiéreux, , la musique country- western sort des portes et des fenêtres et Koreth Reid McCoy se presse de rentrer chez elle à la fin des cours à l’école.